Changer de vie ?

Vous vous levez avec une furieuse envie de bousculer les habitudes, de crier au passé que vous faisiez que passer, d'embrasser le présent et de mordre à pleines dents dans le fruit de la connaissance, et vous vous tournez vers l'avenir. Vous voyez les minutes, ces gangues chères à Baudelaire, qu'il ne faut pas lâcher sans en extraire l'or, comme des opportunités à saisir et quand vous prenez conscience des années que vous avez cumulées au compteur et de celles qui vous restent à vivre, le coeur s'emballe et vite vite l'urgence de faire quelque chose de sa vie devient imminent. Des idées qui clignotent au néon rouge dans la tête : changer de vie. Ne pas vouloir que demain ressemble à aujourd'hui. Changer, envoyer valser, contrarier le cours normal des choses, c'est être pleinement acteur de sa vie.

A une époque où les émotions n'ont jamais autant fait vendre, qu'il est bon de s'insuffler des doses d'adrénaline, rien qu'en travaillant du ciboulot, passer par la peur, l'excitation à l'évidence du changement de cap à prendre.  Le recyclage de son être malmené par la civilisation, entre la peur de prendre son boulot ( quand on ne l'a pas déjà perdu), le burn-out et les constantes stimulations qui veulent nous montrer que l'herbe est toujours plus verte ailleurs. Nous carburons à l'insatisfaction chronique, parce qu'être insatisfait de sa vie, vouloir toujours plus, chercher ailleurs, tout cela est vu comme une marque d'intelligence, alors qu'il n'est que le vil reflet de la société de consommation. Il devient obligatoire de réussir sa vie. On honnit l'immobilité et l'immobilisme, on glorifie le mouvement.

Là où le bât blesse, c'est que nos envies d'ailleurs coûtent cher. Il est malheureusement assez difficile de tout plaquer comme ça et de reprendre sa vie ailleurs, loin de notre cadre habituel. Disons que comme dans la vie de tous les jours, ceux qui ont le plus d'argent sont les plus aisés. Il y en a cependant qui troquent un métier rempli de responsabilités contre un travail plus près des gens et des êtres, et souvent avec un salaire moindre. Car bien sûr, changer de vie, c'est aspirer à une vie qui a plus de sens, se libérer du matérialisme et partir à la quête de soi.

Le changement doit être personnel, on le sait. Qu'il soit le fruit d’une lente maturation ou un déclic intérieur, il est souvent la conséquence d'une vie que l'on trouve de moins en moins satisfaisante. Recherche de sens ? Epanouissement ? Suis-je fier de ce que j'entreprends ? Voici un échantillon de questions qui peuvent être posées.

L'attrait du "tout nouveau tout beau " a encore de longs jours devant lui.Le fantasme de la table rase, du grand coup de trique dans le magasin de porcelaine où nos contraintes éclatent avec fracas, le grand défouloir en quelques mots et actes qui ont un goût d'absolu et qui nous font tenir les rennes de notre vie aussi. Dans tous les cas, c'est la grisante impression de se donner une nouvelle chance dans la vie, voire de carrément changer de vie et cela nous rapproche de ce que nous n'atteindrons jamais, l'immortalité.